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La politique de l’Eau et la Pollution agricole dénoncées par la Cour des Comptes (rapport 2010).

mardi 30 mars 2010, par Gérard Borvon

Dans un rapport qui n’avait pas été diffusé et dont Le Monde s’était procuré une copie datée de fin décembre 2009, la Cour des comptes dresse un constat sévère des "insuffisances" de la politique de l’eau en France dans les années 2000, et doute "de la capacité de la France d’atteindre, dès 2015, les objectifs de qualité qu’elle s’est assignée".

(le document a été publié depuis, voir le lien en fin de texte)


Dans ce document d’une vingtaine de pages, la Cour dénonce la persistance des pollutions d’origine agricole et le non-respect des directives européennes sur la teneur en nitrate des eaux. "Les instruments d’intervention mis en oeuvre pour combattre ce type de pollution sont assez modestes, écrivent les auteurs. Le levier fiscal est largement inopérant, faute de redevance sur la pollution azotée (...) réellement dissuasive", malgré une augmentation récente de celle-ci. Les agences de l’eau (chargées de collecter les redevances et de financer la politique de l’eau) subventionnent en outre les actions curatives pour des montants 1,8 fois supérieurs à celles préventives, relèvent-ils.

Le document rappelle également le retard français dans l’application de la directive européenne sur le traitement des eaux usées (ERU), dont une "part notable" est imputable aux collectivités locales. Malgré l’accélération récente de la mise aux normes, le risque de condamnation persiste. Il est estimé par la Cour à 150 millions d’euros. Ce contentieux relève, selon les auteurs, des "dysfonctionnements systémiques" : dilution des responsabilités, attentisme des agences, caractère insuffisamment répressif de la police de l’eau... Le texte écorne au passage le "modèle français" de l’eau. Les comités de bassins des agences de l’eau, qui devraient être des "Parlements locaux de l’eau", sont en fait dominés par les "groupes professionnels, mieux à même de faire prévaloir leurs préoccupations dans la durée que les élus et les associations", selon le rapport.

Dans sa réponse à une version préliminaire du rapport, le ministre de l’écologie, Jean-Louis Borloo, souligne que la cour "projette des constats de la période 2000-2006" sur l’horizon 2015, et ne tient pas compte "de l’immense mouvement de transformation engagé depuis trois ans". Depuis 2009, les investissements des agences de l’eau sont "nettement plus sélectifs", selon le ministre. Le Grenelle de l’environnement a également fixé des objectifs ambitieux en matière de réduction des pollutions agricoles, dont les effets ne peuvent se faire sentir immédiatement, affirme M. Borloo.

Gaëlle Dupont


Voir sur le site de l’IGEPAC


Le rapport publié

Le rapport a finalement été publié. A lire absolument !

Extrait :

La France revendique le caractère exemplaire de la politique de
l’eau mise en oeuvre dès les années 1960, mais si ses principes ont bien
inspiré d’autres pays, ses résultats sont plutôt décevants, qu’il s’agisse de
l’état des ressources en eau ou du respect des échéances communautaires.

ou encore :

Les résultats décevants constatés sur les nitrates comme sur les
pollutions par les produits phytosanitaires trouvent en grande partie leur
origine dans une insuffisante volonté de l’Etat, aux niveaux
communautaire et national, de remettre en cause des pratiques agricoles
durablement marquées par l’encouragement au productivisme et le choix
d’une agriculture intensive.